L’évocation du mot pygmée suffit à susciter toutes sortes de curiosités quant à leur mode de vie, leur civilisation mal connue. Toutes sortes d’hypothèses ont été formulées depuis la nuit des temps quant à leur vie sauvage. Le mythe du pygmée chasseur cueilleur a stigmatisé les esprits depuis les récits des premiers explorateurs jusqu’à ce jour. A la question de savoir qui sont les pygmées ? La réponse qui viendra toute suite à l’esprit serait celle que l’on trouvait dans les manuels d’histoire datant du siècle dernier : « ce sont les Hommes de petite taille qui vivent de la chasse et de la cueillette ». s’ils sont restés pendant des millénaires coupés du reste du monde, de nos jours leurs campements sont régulièrement visités par les bantous et autres étranger en quête de leur savoir faire ancestral surtout dans les domaines de la médecine et de la métaphysique. 
La culture des pygmées repose entièrement dans son environnement qu’ils exploitent en tout et pour tout. Ils y prélèvent gibiers et poissons pour leur subsistance, bois de chauffe, matériaux de construction pour leurs huttes, fruits, feuilles et miels dont ils raffolent. Mais ils y prélèvent surtout feuilles, écorces et racines dont les vertus curatives font d’eux des tradi-praticiens très réputés.
Le strophantus, un arbre récemment découvert par la médecine moderne permet aux pygmées de soigner depuis toujours de manière spectaculaire plaies et blessures
graves grâce à son écorce. La forêt est donc pour le pygmée baka un élément
capital. C’est le lien entre l’Homme et les esprits qui veillent sur eux, les protèges ou les punissent.

Le Djengy ou l’esprit de la forêt

D’après une mythologie de la tribu Baka de l’Est Cameroun, la forêt serait une entité vivante dotée d’intelligence. Le maître de la forêt serait un géant nommée
« Djengy ». Celui-ci veillerait en permanence sur la forêt et ses habitants. Djengy serait à l’origine des milles et un miracles qu’on attribut aux pygmées lors des
séances de guérison. Lors de notre recherche sur les pygmées Baka, nous avons personnellement rencontré deux camerounais d’origine bantou riverains des
campements pygmées et ayant contribués à une enquête sur les pygmées Baka de l’Est. Ces bantous nous ont confirmés l’existence de «Djengy » et l’un d’eux qui au
cours d’une cérémonie de guérison dans un campement aurait eu le privilège d’assister à l’apparition de Djengy nous a dresser son portrait en ces termes :
« Djengy est un être vivant fait de chair. Ce n’est pas un spectre, comme je l’imaginais. Car le spectacle auquel j’ai assisté n’avait rien d’une vision abstraite.
Djengy est arrivé, en pleine cérémonie. C’est un géant de plus de 6 mètres. Il a la forme humaine de la poitrine jusqu’à la tête. Sa partie du bas est d’une forme
animale avec des sabots. Il s’est avancé au rythme de la musique. A esquissé quelques pas de danse autour des malades, il est ensuite rentré dans la forêt.
Beaucoup parmi nous tombés en transe, avaient perdus l’usage de la parole. Ils devaient être soignés après le départ de Djengy. Ceux là, n’ont plus un souvenir de
cette apparition. Ceux qui comme moi s’en souviennent ont été choisi nous a-t-on dit par Djengy pour être initié à son culte qui, en réalité se résume au simple respect de
la vie et de son temple (la forêt) ». Beaucoup de pygmées affirment avoir entendu parler de Djengy. Certains ne l’on jamais vu, ils savent cependant qu’il existe. D’après eux, c’est Djengy qui choisit ses adeptes et non le contraire.

Valeurs culturelles propres aux populations Pygmées

  • Société égalitaire fondée sur la notion de partage ;
  • Prévalence du libre arbitre ;
  • Conservation des valeurs communautaires axées sur le principe de nomadisme   et de mobilité ;
  • Reconnaissance et prédominance du pouvoir de décisions de la femme
  • Pygmée dans la communauté ;
  • Peu de possibilités de loisirs ;
  • Prédominance de la culture orale.

Caractéristiques et attitudes traditionnelles des Pygmées

  • Peur et la méfiance vis-à-vis des pratiques dites modernes ;
  • Complémentarité de l’homme et de la femme Pygmées dans tous les domaines ;
  • Premier recours aux thérapies traditionnelles en cas de maladie ; Forte   croyance aux valeurs traditionnelles et à la sorcellerie (la maladie étant
  • considérée dans l’imaginaire Pygmée comme un mauvais sort).

Des guérisseurs réputés dans tout le Cameroun

Les Pygmées Bagyeli (Région de Bipindi, Cameroun) sont connus par tous les camerounais pour être les meilleurs guérisseurs du pays. Même les Bantous viennent les consulter, pour demander des plantes ou des soins. Les Pygmées, respectant leurs traditions, utilisent les ressources mises à leur disposition par la nature pour se soigner. Ils fabriquent eux-mêmes leurs remèdes, d’une part parce qu’ils sont attachés à un mode de vie hérité de leurs ancêtres et d’autre part car sans argent et sans papiers administratifs, ils n’ont pas accès aux soins dispensés par l’hôpital.

Les plantes sont l’élément principal des soins dispensés par les Pygmées, ils l’utilisent sous forme d’écorces, de racines, de feuilles, et d’épines pour faire des décoctions, des tisanes, de la poudre pour scarification, des injections par voie nasale pour leurs différents soins. Le gibier est également un élément très utilisé par la médecine pygmée. Il n’est pas rare de trouver un pendentif d’ossements de gorille tenu par une lamelle de peau d’animal autour du cou d’un enfant, le but étant de permettre à l’enfant en question d’avoir des os durs comme celui de l’animal. Ils utilisent aussi les poils de certains animaux pour cicatriser les brûlures par exemple. Certains types de pierre entrent également dans l’élaboration de soins pour la communauté, une pierre est jetée au feu et après être bien chauffée, elle est retirée pour la placer devant le patient et verser dessus une solution médicamenteuse.

Les Pygmées Bagyeli se sont installés dans le Sud-Ouest du Cameroun pour sa
richesse en espèces animales et végétales, propice à la fabrication de leurs remèdes. Or, depuis quelques années, de grandes plantations ont été mises en place sur ces terres, de nombreuses espèces végétales disparaissent et les animaux se raréfient ou s’éloignent de plus en plus des campements ; et la construction d’un l’oléoduc a également mis en péril l’équilibre du milieu naturel.

A ce problème écologique s’ajoute celui de la transmission du savoir. En effet, de la même manière que les plantes disparaissent, c’est également le cas pour les
guérisseurs. Le pouvoir de guérison est traditionnellement transmis par le père à
celui de ses fils qu’il juge le plus sage pour en hériter. Or les parents trouvent de moins en moins leurs fils capables d’assumer une telle responsabilité, ceux-ci ne maîtrisent plus la forêt assez bien, ni les connaissances et les secrets qui lui sont liés et qui donc disparaissent à grande vitesse. En effet, à mesure que la forêt diminue, les rites d’initiation, à travers lesquels étaient transmis le savoir-faire et les connaissances des Pygmées, disparaissent avec elle.

Il serait intéressant de mettre en œuvre un projet de revalorisation de cet art des guérisseurs Pygmées, qui prend en compte tous les aspects de l’être humain tout en respectant la nature et qui occupe une grande place dans la culture et le savoir-faire Pygmées.

WEBLIOGRAPHIE
http://fondaf-bipindi.solidarites.info/medecine-traditionnelle.php www.ethno-web.com